Étudier en Corée du Sud sans parler coréen (témoignage)

Publié par Fabien Sekai le

Étudier en Corée du Sud sans parler coréen, quand on est la seule française (et étrangère) de sa promotion… ça fait quoi?

Et bien, Laurie nous raconte comment elle vit cela à 19 ans dans la ville de Icheon, située à la province de Gyeonggi!

Barrière de la langue, son intégration, les cours, le choc des cultures etc. Elle nous dit tout!

Aujourd’hui je suis en compagnie de Laurie avec qui on va discuter de faire ses études en Corée du Sud!

Bonjour, je m’appelle Laurie, j’ai 19 ans, bientôt 20, et je suis étudiante en Corée en échange universitaire, en étude d’animation à Icheon (이천), qui est du coup une petite ville, pas du tout à Séoul.

Ce qui m’a intéressé dans son histoire, c’est qu’est la seule étudiante étrangère dans sa classe, j’ai bien dit étrangère, et non française! C’est un cas particulier parce qu’en général, ceux qui vont étudier, notamment à Séoul, en université internationale, ont l’habitude de fréquenter des étrangers où il est possible d’échanger en anglais, voire en français!

Dans mon cas, si je trouve quelqu’un qui parle anglais, c’est déjà le saint Graal!

Du coup, est-ce que tu le savais avant de partir que tu allais être la seule étrangère?

Oui, je le savais, comme je fais des études déjà très spécialisées. Dans l’animation notamment, il y a déjà pas beaucoup d’écoles en Corée, il me semble qu’il y en a à trois.

Ils reçoivent très peu d’étrangers, et du coup quand j’ai postulé, je savais très bien que l’école était entièrement en coréen, avec les cours en coréen et aucun étranger, même pas des chinois ou des japonais.

Est ce que tu avais choisi cette université pour cette raison?

C’était un bonus, vu que je suis déjà bilingue en français-anglais, j’aimerais beaucoup être trilingue. Mais la raison principale est que dans l’animation, il faut aller dans des grandes écoles.

J’ai juste cherché l’école la mieux classée dans les classements mondiaux, et cette année, cette école était 7e, c’est la seule école coréenne qui est classée dans les mondiaux.

J’ai pris cette école là parce qu’elle a vraiment des capacités, une manière d’apprendre, qui étaient très intéressante. Et comme elle est pas à Séoul, ça me forçait à apprendre le coréen, de me mettre en difficulté un petit peu!

Et malgré les difficultés, ça va quand même ton quotidien? 

Le quotidien ça va, je pense qu’il y a certaines personnes qui peuvent vivre un échange universitaire plus catastrophique, dans le sens où quand on est plein d’étrangers, on a tendance à traîner qu’entre étrangers, entre nous, alors que par exemple, il suffit de voir là, en France, je suis dans la « team des asiatiques » et tous les asiatiques traînent ensemble, dans le sens où ils sont plus reliés l’un à l’autre.

Je suis reliée à personne, du coup tout le monde vient me parler parce qu’ils sont super intrigués, genre « d’où il y a une étrangère ici ». Il y en a qui viennent me voir « oh tu t’appelles Laurie, c’est toi l’étrangère, c’est incroyable » j’ai l’impression d’être une légende, les gens connaissent trop ma vie alors que je leur ai jamais parlé. Ils savent tout de moi, il y a des rumeurs, des trucs comme ça…

Au final, ma vie, c’est bien, dès que j’ai un problème, que je perds ma carte de crédit par exemple, j’ai mes potes qui sont là pour m’aider, pour me passer des sous en attendant que je reçoive les miens, des trucs comme ça.

Et en plus, tu m’as raconté qu’à l’origine, tu es plutôt introvertie?

Oui, je suis très « chez moi », je fais mon travail, j’ai beaucoup de travail,  je suis très occupée comme personne en France, comme en Corée, mais en Corée du coup, les gens viennent plus me parler.

Quand les gens viennent me parler, c’est plus simple en tant qu’introverti de fréquenter la personne. Je dirais pas non plus que j’ai des grands amis dans mon école en Corée, mais je connais pas mal de gens, et ça permet de pas être toute seule, ça évite d’avoir le blues, le cafard ou quoique ce soit.

C’est un point important qu’elle est entrain de dire, même si vous partez étudier seul en Corée du Sud, c’est quand même facile de rentrer en contact avec les gens, qui seront « intrigués » d’échanger avec vous!

Il y a même beaucoup de gens qui sont intéressés par la France. Par exemple j’étais sortie à Itaewon (quartier international de Séoul) une fois, j’ai rencontré un coréen qui va à l’académie pour apprendre le français, et du coup je vois cette personne de temps en temps pour apprendre moi le coréen et lui le français.

Les coréens sont assez ouverts d’esprit, les coréens qui viennent nous parler sont ouverts d’esprit souvent.

T’as pas eu de difficultés à faire des rencontres?

Non ça était!

C’est un point très important, je sais qu’il y en a qui ont un peu peur avant de partir, c’est un exemple parfait, j’en parle souvent dans mes vidéos et articles, que lorsqu’on voyage seul, c’est paradoxalement le meilleur moyen de faire rapidement des rencontres, on est pas dans une bulle avec notre compagnon de voyage, c’est un point très positif!

Aussi, aller au dortoir, choisir un dortoir plutôt que de prendre son appartement, c’est bien, j’aurais pu prendre mon propre appartement et j’ai choisi de prendre un dortoir, dans le sens où du coup, j’allais pratiquer le coréen avec mes colocs!

Dans mes colocs, y en a une qui connaît quelques mots d’anglais, mais c’est pas ça non plus, et les autres ne parlent pas du tout anglais, on fait des séances de tarot, des trucs comme ça, pourtant mon niveau de coréen est très nul et j’ai pas de cours de coréen, je suis seule avec mes sites internet, et c’est tout.

C’est un très bon conseil, je dis souvent de commencer son PVT, notamment dans les Guest Houses en dortoir, parce que quand on arrive, faut faire des rencontres. On se l’ai même pas dit avant, et tu as confirmé mes propos, ça fait plaisir. Et du coup en classe, tes cours sont en anglais ou coréen?

Alors en Corée, comparé à la France, où quand on arrive dans une filière, on a des cours prescrits: en Corée, on choisit nos cours, donc on peut choisir entre 5 et 8 cours pour le semestre. Donc moi j’en ai 7, dont 1 qui compte pas vraiment, on me l’a mis histoire de me donner des crédits pour passer en 4eme année, mais là sinon mes cours sont tous en coréen.

J’ai choisi un cours exprès où le prof ne parlait pas anglais car la plupart des cours, c’est des profs qui parlent anglais, du coup à la fin des cours, ils viennent me voir et m’expliquent les devoirs. Ils m’expliquent des choses à faire et j’ai un cours en anglais parce que j’ai un prof qui est vietnamien et qui ne parle pas coréen.

Son cours est en anglais avec une traductrice coréenne, mais en tant qu’étudiante, je suis la seule étudiante étrangère et lui le seul prof étranger, et on a beaucoup de profs qui sont nés en Amérique par exemple, du coup au final, ils se débrouillent en anglais et nous aident pas mal.

Ils s’adaptent à ce qu’on fait. Comme je viens d’une école différente, je suis en 3eme année en France, mais en Corée je suis entre la 1ère et 2ème année. Mon niveau 3eme année est pile entre la 1ère et 2ème année chez eux.

J’ai des devoirs différents des autres parce qu’ils veulent pas que je sois à la ramasse, et veulent que je m’amuse, c’est ça surtout, quand on est étudiant à l’étranger, les profs font très attention à toi, font très attention à ce que tout aille bien.

Je reçois toujours des messages de mes profs « ça va cette semaine » comme ils voient que j’ai un niveau parfois plus élevés, parfois plus bas que d’autres, du coup ils changent mes devoirs par rapport aux autres, pour que je puisse passer en 4ème année à mon retour en France.

Tout est mit en œuvre pour que tu sois à l’aise dans tes études, et pas trop à la ramasse, en plus c’est super courageux de ta part puisque tu étudies qu’en coréen!

J’ai étudié le coréen quand j’étais en France pour préparer le TOPIK (test d’évalution du niveau en coréen). Je me levais à 5 heures du matin pour étudier le coréen avant d’aller à l’école, et maintenant que je suis directement en Corée, j’ai plus besoin de faire 3heures de cours et par jour etc. souvent je me réveille vers 6h30~7h et mes cours commencent soit à 9am soit à 1pm.

Souvent, toute la matinée est dédiée à apprendre  le coréen avec un manuel que j’ai récupéré de la Yongsei University. J’apprends le coréen le matin avant d’aller en cours car je suis trop crevée le soir!

Très bon exemple comme quoi il faut être régulier. Perso je me vois pas étudier en coréen!

En soi c’est bien de se mettre en difficulté parce que par exemple, j’ai quitté mon école en France; pas que je me tournais les pouces mais j’étais en mode: « le retard sur le projet c’est pas très grave, si on n’a pas fait nos devoirs, c’est pas très grave » j’avais envie de venir en Corée et vraiment devoir être assidue dans mon travail et d’être forcée à apprendre une langue, surtout ça!

Très bon exemple comme quoi faut sortir de sa zone de confort, elle a fait la totale, s’expatrier et des cours en coréen. Bravo! Est-ce que tu peux nous dire ton niveau en coréen avant de commencer les études?

Zéro! J’ai appris l’alphabet, et encore je ne connaissais pas très très bien. J’ai appris l’alphabet l’année dernière avant de venir la première fois en Corée. J’ai appris l’alphabet et je passais mon temps à lire les panneaux sans comprendre ce que c’était marqué.

J’ai pris rendez vous avec quelqu’un pour apprendre le coréen 2 fois pendant mon voyage et j’ai appris comment faire des verbes, le présent, passée et future. Je peux pas dire que je peux me débrouiller non plus mais je peux aller au restaurant, demander si c’est épicé, des trucs très basiques.

La langue des signes ou l’anglais ça passe toujours!

Vous voyez elle s’est pas dit « oh je parle pas coréen du coup je peux pas aller étudier en Corée du Sud » elle s’est motivée, très beau parcours. Tu arrives à suivre tes cours en coréen?

Je suis dans des études assez spécialisées, c’est beaucoup d’ordinateur, on fait de la 3D etc. du coup je regarde ce que le prof fait à l’écran et quand je vois par exemple qu’il clique sur certains « settings » (configurations) etc. je vais sur Google et je cherche des cours qui sont en relation avec ce que le prof fait.

Quand le prof fait son cours, je suis pas ce qu’il fait mais je vais sur internet pour essayer de suivre des cours en anglais ou en français sur Youtube, ou sur des blogs, pour apprendre, pour suivre un peu ce que le prof raconte.

Comme je suis dans des études spécialisées, tout ce que j’ai à faire, c’est de savoir, « tiens tu dois dessiner un personnage, tu dois dessiner une maison » une fois que je le sais, ça va, j’ai pas besoin de suivre un cours très régulièrement. Google est ton ami, même en cours, toujours!

Alors y a un point important qu’on a oublié de mentionner, c’est que t’étais déjà venu en Corée du Sud!

J’étais venue 2 mois l’année dernière et c’est justement à ce moment là que beaucoup de gens m’ont parlé de comment c’était l’école en Corée, notamment j’ai une copine à Ehwa (université de Séoul) qui est du coup étudiante en art, donc assez proche de ce que je fais.

Elle m’a expliqué comment c’est, et ça m’a donné envie. Si je n’étais pas venu en Corée avant, je n’aurais pas tenté de venir étudier directement dans une école, comme je parle pas du tout coréen ou quoi que ce soit.

Si pour vous le challenge est trop important, hésitez pas à y aller comme Laurie, une première fois, tâter le terrain, voir si vous aimez la Corée du Sud. S’expatrier, c’est quand même un projet sur le long terme, donc il y en a parfois malheureusement qui finalement se rendent compte que la Corée, c’est pas trop leur truc!

Le premier mois j’ai vécu dans une famille mais je pense que si j’avais vécu genre dans un Goshiwon (petite chambre étudiante) ou quoi que ce soit… je vivais comme un autochtone on va dire, j’allais au café au cinéma, j’allais voir des potes et après le dernier mois, j’ai fait des visites histoire de dire « oui quand même, j’ai visité Gyeongbokgung (palace) ».

Quand on est en Corée, on essaie de vivre comme comme les gens, aller faire du vélo, sortir, rester à la maison et rien faire.

Merci beaucoup à Laurie pour ce témoignage!

Pour aller plus loin, voici des articles complémentaires:

PVT Corée du Sud sans parler coréen = danger?

Ma méthode pour apprendre le coréen seul en Corée du Sud

Vivre1 année en Corée du Sud: mon bilan